Asymétrie
Que peut un seul insoumis contre une industrie d’usines d’armement, de vigiles, de technologies de pointe, de soutien logistique, qui sait déplacer des milliards de livres, dollars, euros ?
Que peut une seule pierre contre un bataillon d’agents emballés et blindés, munis d’un arsenal d’armes plus ou moins létales ?
Que signifie un seul tract dans le fleuve d’informations, d’opinions, de propagande qui semble uniquement vouloir confirmer l’inéluctabilité de ce monde ?
C’est une guerre perdue d’avance…
C’est un conflit où l’on se trouve les mains vides face à un ennemi armé jusqu’aux dents.
Ce n’est pas désespéré, c’est suicidaire.
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Sauf si le conflit ne se trouve pas là où l’on croît le percevoir.
Si l’on refuse de marcher au pas dans cette société.
Si l’on ramasse une pierre pour s’y opposer.
Si l’on pose des mots sur papier pour entamer le dialogue avec d’autres rebelles (potentiels).
Ce sont des actes par lesquels nous donnons nous-mêmes du contenu à la vie, tous des pas sur un chemin, avec la liberté comme boussole.
Aucune force militaire ne peut l’empêcher. Il n’y a pas de victoires à remporter ni de pertes à encaisser puisque nous n’avons pas de territoire à conquérir ni de pouvoir à prendre.
Voilà pourquoi il s’agit d’un conflit asymétrique. Pas parce que dans la somme des moyens, l’autorité triomphera toujours et que toute résistance apparaît vaine.
Mais parce que ce que nous voulons se trouve sur un tout autre champ que celui où se meut l’autorité.
Par cette force asymétrique, les ennemis de l’autorité pourront toujours faire usage de leur créativité pour se mettre en travers de sa route. Les forces de l’ordre entraînées des Etats doivent régulièrement encaisser des coups d’ex-sujets non-entraînés et peu armés.
Ces « succès tactiques » sont les effets secondaires bienvenus du choix de l’insurrection qui se répand comme un virus à travers les actes et les mots de ses protagonistes et qui continuera toujours à contaminer d’autres individus.
C’est un conflit asymétrique parce que ce que je veux est étranger au monde de l’autorité. Parce qu’elle ne pourra jamais me donner ce que je veux, ni me l’enlever.